GORZE : ses heurs et malheurs

lorraine3frontieres, vendredi 26 mai 2006 - 18:00:00

GORZE

ses heurs et malheurs

par Marcel GOURLOT


A Gravelotte, un musée bien présenté rappelle le souvenir des combats héroïques de 1870.

De là, nous descendons sur Rezonville, puis toujours à travers la campagne, empruntons la départementale 103 B jusqu'à GORZE.

Nous décidons d'y déjeuner, mais en quittant la voiture, nous sommes séduits par cette merveilleuse petite localité située dans une vallée entourée de forêts.

L'abbaye de GORZE, fondée en 749, a joué un grand rôle dans l'histoire du pays. On n'en peut douter en voyant la richesse des monuments. L'église du XIIème siècle a fière allure sur son promontoire avec son clocher coiffé d'un toit en bulbe. Le château abbatial est aujourd'hui transformé en hospice départemental. De GORZE, on peut faire de nombreuses promenades superbes, que ce soit dans le " Bois des Chevaux ", le " Gros Bois " ou le " Bois des Ognons ". Les sources de cette localité avaient été captées par les romains et leurs eaux allaient à Metz par un aqueduc dont il reste encore d'importants vestiges à Ars et à Jouy aux Arches.

Après une belle promenade apéritive, nous nous restaurons dans une agréable auberge. Claire, sur sa carte routière, entoure GORZE d'un rond qui en dit long sur le souvenir que va laisser cette bourgade dans sa mémoire.

- Une petite merveille! Conclut-elle. "

André FONNET

" Flâneries en marge du METROLOR "

La vie du rail n° 1418 du 25 novembre 1973

Les origines de GORZE sont très anciennes. Pour l'époque la plus reculée, l'histoire se confond avec la légende. Mais le RUDEMONT n 'étant pas loin, il est permis de penser que les premiers hommes ayant occupé nos régions chassaient dans les forêts de la future Terre de GORZE.

Il faut attendre les légions romaines et l'ère chrétienne pour trouver des occupants permanents en ces lieux.

La construction de l'aqueduc commence-t-elle sous le règne d'Auguste ou sous celui de Trajan? Les historiens ne se sont pas mis d'accord sur ce point. Outre l'aqueduc, les vestiges gallo-romains trouvés en divers endroits de la localité attestent de la présence romaine. Selon la légende, les gardes d'un poste établi à GORZE pour surveiller et entretenir l'aqueduc voient un jour, vers la fin du IIIème siècle, venir à eux trois étrangers de noble aspect et parlant latin. Ces hommes, des clercs venus de Rome pour prêcher l'Evangile aux médiomatriques (les messins de l'époque) s'appellent Clément, Félix et Céleste. Ils s'installent pour quelques temps à proximité de la source " des Bouillons ", où naît l'aqueduc, et édifient un petit oratoire. De là, ultérieurement, ils gagnent Metz après s'être arrêtés au sommet de la côte où s'élève aujourd'hui la Croix Saint Clément.

A cet endroit, d'où l'on découvre la vallée de la Moselle et Metz, ils s'agenouillent et rendent grâce à Dieu. Une pierre cerclée de fer, portant la trace des genoux du futur Saint Clément, perpétue le souvenir de cet instant privilégié. Maurice BARRES nous a donné une admirable description de ce site dans " Collette Baudoche ".

Photo de la Croix Saint Clément sur les hauteurs de Ancy sur Moselle.

La légende veut que, de cet endroit, Saint Clément, premier évêque de Metz arrivant des Gaules, aperçut la cité qu'il venait évangéliser

L'ABBAYE

Sa fondation, sa prospérité :

Les chartres du VIIème siècle mentionnent le nom de " HALDINIACA FINIS ". C'est sur ce finage d'Haldigny que s'élèvera l'abbaye.

Le nom de GORZE, qui est vraisemblablement un dérivé de " gouffre " n'apparaît que lors du synode de Compiègne en 756 qui institue canoniquement l'abbaye.

L'abbaye, en fait, est née avant 745, fondée par CHRODEGANG, trente-septième évêque de Metz et petit-fils de Charles MARTEL.

Cette fondation intervient peu de temps après que la région messine ait été ravagée par les invasions répétées des barbares et par celle des Huns. Tout est à faire ou à refaire. Les moines, des bénédictins, se font bâtisseurs, éleveurs, agriculteurs et entreprennent de mettre en valeur le terroir. GORZE se développe et prospère à l'ombre de son abbaye.

L'influence spirituelle de GORZE se fait sentir dans toute l'Europe pendant au moins sept siècles. Son enseignement monastique fait autorité et les moines de GORZE essaiment dans toutes les abbayes de la région. Les abbés de GORZE jouissent d'une large audience et participent à l'élection du Maître
Echevin de Metz. Ils rendent la justice et font battre monnaie à leur coin.

Durant les règnes qui se succèdent, les dons de biens à l'abbaye affluent. GORZE a des possessions jusqu'en Champagne.

CHARLEMAGNE confirme la fondation de l'abbaye par une chartre datée de 772. L'abbaye atteint son apogée sous l'impulsion de l'Abbé AGENOLD qui met en vigueur la réforme d'ADALBERON, (application stricte de la règle de Saint Benoît) et de Jean de VANDIERES. A la fin du Xème siècle, Henri, dit " le bon Abbé " restaure l'abbaye et fait édifier l'église paroissiale qui subsiste de nos jours. Les restes de Henri " le bon Abbé " reposent dans le choeur de l'église du coté de l'Evangile.

Du XIème au XIIIème siècle, la région éclate en de multiples seigneuries. Les familles féodales se jalousent et s'affrontent. La Terre de GORZE traverse cette période tant bien que mal et les épreuves ne lui sont pas ménagées.

Du XIVème au XVIème siècle, l'histoire de l'abbaye est marquée par un certain nombre de coups de main, notamment par la mise au pillage de GORZE en février 1444 par une bande faisant partie de l'armée de CHARLES VII, Roi de France.

La mise en place d'abbés commendataires, tel Jean GEOFFROY, ne contribue pas au bon renom de l'abbaye. Il faut toutefois signaler le passage sur le siège abbatial de Julien de la ROVERE (abbé de GORZE de 1473 à 1486). Ses mérites le conduiront au trône de Saint Pierre qu'il occupera sous le nom de Jules II. Les abbés qui lui succèderont vont présider, sinon contribuer (car ils ne sont pas prêtres) à la déchéance de l'abbaye. Le siège abbatial devient l'apanage de la famille de Lorraine. GORZE a ainsi un abbé de 10 ans! d'ailleurs déjà évêque de Metz depuis 3 ans!

A la
Noel 1542, Guillaume FAREL, disciple de CALVIN, interpellant un prédicateur, provoque une véritable émeute. Les femmes de GORZE se jettent sur lui et lui arrachent la barbe et les cheveux. Il ne doit son salut qu'à l'intervention du capitaine du fort et de ses hommes.

En avril 1552, le connétable de Montmorency, en marche vers Metz, met GORZE à feu et à sang.

Charles de GUISE, Cardinal de Lorraine, abbé de GORZE en 1572, loin de restaurer l'abbaye, va lui donner le coup de grâce. Dom CALMET nous rapporte qu'il avait conçu le dessein de faire séculariser l'abbaye et de détourner ses revenus pour établir une université à Pont à Mousson. Il voyait dans ce projet un moyen de lutter contre le protestantisme, et une excellente école pour asseoir l'influence du clergé dans les Trois
Avêchés. Son successeur et cousin, âgé de 7 ans, a pour administrateur son propre père, Charles III, Duc de Lorraine.

En 1580, le projet de Charles de Lorraine Guise devient réalité et le Duc Charles III sécularise l'église. Par deux bulles, le Pape Grégoire XIII décrète la sécularisation de GORZE et l établissement de l'Université de Pont à Mousson.

Les droits acquis aux dignitaires et aux moines encore vivant sont cependant maintenus.

L'Abbé séculier conserve les pouvoirs et les précatives de ses prédécesseurs. Une charge de recteur, dévolue au curé de la Paroisse remplace les anciens offices claustraux.

Pour succéder à la communauté religieuse, on crée six canonicats pour des prêtres et quatre bénéfices pour des clercs.

L'abbé, le recteur, les chanoines et les clercs constituent le chapitre. En ce qui concerne l'Université de Pont à Mousson, on prévoit de prélever une rente annuelle de quinze cents écus d'or sur les revenus de l’abbaye pour assurer sa fondation et pourvoir à son entretien.

Réduite à l’état de principauté temporelle, l’abbaye va être l’enjeu partiel des incessantes querelles des deux rivaux que sont la France et la Lorraine. Pour pallier toute velléité de restauration, l’abbaye est rasée en 1582. Les restes du vieux monastère sont abattus et les décombres servent de carrière aux gens de GORZE.

Attribuée à Charles de REMONCOURT, fils naturel du Duc Charles III et 60èmè abbé de GORZE (1603-1648), l’abbaye voit sa ruine consommée.

Durant la guerre de Trente Ans, en 1636, les bandes lorraines et croates mettent GORZE à sac une nouvelle fois. L’église paroissiale porte encore les stigmates de l’incendie qui la ravagea.

(Photo : Église de Gorze, figuration du jugement
dernier, fin 12ème siècle)

En 1650, la France qui considère la Terre de GORZE comme partie intégrante des Trois
Evêchés, donne l’abbaye à François Egon de FUSTENBERG, jeune ecclésiastique d’origine souabe. Cette nomination n’est pas ratifiée par Rome. L’abbaye se trouve donc disputée entre deux titulaires. En dépit des efforts du Duc de Lorraine, le litige subsiste. Le dénouement intervient dix ans plus tard avec la signature du traité de Vincennes.

Le Duc Charles IV devient le partenaire de Mazarin qui, au nom de Louis XIV, procède à la signature du Traité le dernier jour de février 1661. La clause, faisant da la Terre de GORZE une terre française, stipule que : " le dit Sieur Duc renoncera et renonce présentement à tous droits et prétentions de souveraineté ou autres sur l’abbaye de GORZE, laquelle souveraineté appartiendra sans contredits à l’avenir à sa Majesté ".

Ainsi, la Lorraine renonce à la Terre de GORZE et la France compte une seigneurie de plus, forte d’une vingtaine de village.

François Egon de FURSTENBERG demeure Abbé Royal de GORZE. A la suite de sa nomination à l’évêché de Strasbourg, l’abbaye échoit à son frère Guillaume Egon de FURSTENBERG. En 1688, ce dernier résigne l’abbaye de GORZE en faveur de son neveu Philippe Eberhard de LOEVENSTEIN, déjà prince abbé de Murbach et de Lure. Le prince abbé se révèle bon gestionnaire. GORZE lui doit en outre son château abbatial (l(actuel centre de soins et d’hébergement) dont la construction débute en 1696.

Le successeur du prince abbé est le jeune prince Armand Jules de ROHAN GUEMENEE, déjà archevêque de Reims. De cet abbé, l’on peut retenir qu’il fit renouveler le terrier de l’abbaye, c’est à dire le recensement complet de ses droits et propriétés. La table générale de cet ouvrage monumental, qui ne compte pas moins de sept tomes grand in-folio nous apprend que l’abbaye posada des biens, droits et revenus dans cent quatorze localités différentes situées en partie en France et en partie dans le Duché de Lorraine et de Bar. L’archevêque meurt en 1762.

Après quelques années de vacance, l’abbaye est dévolue à Monseigneur Bernardin GIRAUD, archevêque de Damas et nonce ordinaire à la Cour de France. Il va sans dire que tous ces abbés ne résident pas à GORZE. Ce sont les doyens du Chapitre qui ont la charge spirituelle des fidèles. Il convient de mentionner particulièrement l’un d’entre eux, Joseph Louis de CHEVREAU qui devint doyen en 1771. Il est déjà membre du Chapitre depuis 1761. Prêtre distingué, l’Abbé de CHEVREAU est le dernier vicaire général de l’abbaye de GORZE. Son portrait est conservé au presbytère.

A la mort de Monseigneur GIRAUD, survenue en 1781, une nouvelle vacance de siège abbatial s’ouvre. Louis XVI ne se souvient de l’abbaye que deux ans plus tard, et en témoignage de ses bonnes relations avec le Saint Siège, nomme Abbé de GORZE le Prince Doria PAMPHILI, nonce apostolique. De prélat débonnaire plait aux gorziens. L’Abbé CHAUSSIER nous rapporte qu’il faisait bon vivre sous sa crosse.

La révolution va rayer de la carte la Terre de GORZE.

En 1790, avec la création des départements, toutes les possessions de l’abbaye sont partagées entre les trois départements de la Moselle, de la Meuse et de Meurthe. GORZE n’est plus qu’un modeste chef-lieu de canton. Comme partout ailleurs les révolutionnaires sévissent. Dans le domaine religieux, la construction civile du clergé vient bouleverser les structures en place. La paroisse est confiée à un prêtre assermenté et lesbiens de l’abbaye et du Chapitre sont dispersés aux feux des enchères. C’est ainsi qu’en 1792, le château abbatial est adjugé à Benoît GARY, citoyen de Metz.

Le dernier survivant du Chapitre, Antoine MALHERBE, se retire à GORZE où il meurt en 1834. Il repose sous la croix érigée près de l’église à l’emplacement de l’ancien cimetière.

Le " Dictionnaire du Département de la Moselle " de VIVILLE (1817) nous apprend que le canton de GORZE compte 24 communes dont la moitié est exploitée en vignobles. GORZE y est qualifié de bourg considérable. Sa population s’élève à 1641 individus. Son territoire comporte notamment 61 hectares de vignes, 3 moulins et 3 brasseries. Le château abbatial, détourné définitivement de sa destination première, devient dépôt de mendicité en 1812.

A la fin de l’année 1813, il est transformé en hôpital pour les militaires revenant de la bataille de LEIPZIG. De 1816 à 1818, l’armée d’occupation l’utilise comme caserne.

Joseph Louis de MARIONNELZ, maire de GORZE entre 1808 et 1815, fonde un collège qui est installé dans les locaux disponibles de l’hôtel de ville. VERONNAIS, dans sa " Statistique historique, industrielle et commerciale du Département de la Moselle " (1844) et son " Supplément " (1852) indique pour GORZE une population de 1810 individus (A l’époque, Ars, l’actuel chef lieu de canton ne compte que 1453 habitants).

La localité comporte une justice de paix, deux notaires, trois huissiers et une brigade de gendarmerie à pied. Par contre, il ne subsiste plus que 28 hectares et 29 ares de vigne. En 1852, GORZE ne possède plus que 1736 habitants. Par contre, le canton est passé de 24 à 28 communes.

Dans son " Histoire de la Ville et du Pays de GORZE ", (1853) NIMAGERN nous rapporte que le 1er Juillet, jour de la Saint Thiébault, une foule considérable de pèlerins vient visiter les reliques du Saint dans la chapelle bâtie en son honneur. A la veille de la dernière guerre, le pèlerinage à Saint Thibault attirait toujours les fidèles. Des boutiquiers et des marchands de cerises venaient s’installer à proximité de la chapelle. Ce pèlerinage a vécu et seuls les promeneurs viennent encore troubler la quiétude des lieux.

Un évènement marquant dans la vie de la cité est l’érection de la statue de Notre Dame sur le mont Saint Blin, à l’initiative de l’Abbé BERGMANN, aumônier de l’asile départemental. L’inauguration a lieu le 16 juin 1868.

Dans son " Petit Guide du Touriste et du Pèlerin " (1923), l’Abbé MASSENET nous relate la cérémonie. L’Evêque de Metz, Monseigneur DUPONT DES LOGES, inaugure le pèlerinage en présence du Général d’AURELLE DE PALADINES. La musique du 2ème Génie et les cuivres da la Société des Jeunes Ouvriers, sous la direction de l’Abbé RISSE, apportent leur concours.

Le pèlerinage a lieu tous les ans, le premier dimanche de mai. Il faut bien reconnaître qu’il n’attire plus les foules. Jadis, 5000 à 6000 fidèles, venus de tous les points de Lorraine, prenaient par à ce pèlerinage. Sur le socle de la statue de la Vierge, on peut lire cette inscription : " Ils m’ont établie Gardienne de leur Ville ".

Après des siècles de luttes incessantes, force est de constater que les trois dernières guerres ont relativement épargné GORZE et ses habitants.

En 1870, GORZE voit passer les troupes ennemis et entend le fracas de la bataille de Rezonville et Gravelotte sans subir aucun dommage. Les monuments commémorant les combats des 16 et 18 août parsèment encore la campagne autour de Gorze, Vionville et Rezonville.

L’annexion va porter un nouveau coup à GORZE. La partition de la Moselle fait que le canton de GORZE est amputé de 11 communes qui restent françaises, à savoir Chambley, Hageville, Mars la Tour, Saint Julien les Gorze, Sponville, Waville, Xonville, Onville, Villecey, Dampvitoux et Tronville.

Du fait de sa situation excentrée, GORZE perd son tribunal et son bureau d’enregistrement qui sont transférés à Ars sur Moselle. Le notaire, les huissiers, l’agent voyer, le commissaire de police et d’autres notables quittent la ville.

Une pétition de 1898, reprenant un voeu de 1866 du Conseil Municipal demande qu’un " chemin de fer " soit construit. Peut être espère-t-on ainsi arrêter l’hémorragie dont GORZE est la victime!

La construction de la ligne est décidée en 1903. Les travaux, commencés en 1911, seront achevés en 1912. La section de ligne de GORZE à Novéant ne devait constituer qu’une première étape. Il était envisagé de la prolonger jusqu’à Amanvillers en passant par Rezonville, Gravelotte et Verneville, ce projet se plaçant dans un contexte militaire. Son extension restera dans les cartons de l’administration allemande.

Le journal " Le Lorrain " du 28 décembre 1912 relate l’inauguration du tramway qui s’est déroulée la veille. Les notables et le tout GORZE en liesse étaient présents. L’euphorie n’était cependant pas générale, les habitants de Novéant, en particulier, voyaient d’un assez mauvais il ce tramway tintinnabuler quatorze fois par jours dans les rues de leur cité sans que cela leur rapportât un centime. Durant la guerre, l’exploitation de la ligne est interrompue.

La paix revenue, les édiles gorziens ont beaucoup de mal à faire admettre que la remise en service de leur tramway est une question de vie ou de mort pour leur commune. Après de multiples interventions, ils obtiennent satisfaction.

A la fin des hostilités, la localité compte à peine 700 habitants, actuellement, elle a à peine doublée. Prise en charge par le Département après 1918, puis par les chemins de fer économiques, la ligne va vivoter. Sans industrie pour alimenter son trafic, elle était vouée à une existence éphémère.

Entre 1927 et 1932, le tramway ne survit que grâce aux subventions qui lui sont octroyées. Les années 30 voient paraître un concurrent rieux avec la mise en place des premiers services de car. Dès 1932, GORZE sera relié à Metz par un service régulier. Le tramway de GORZE a vécu, son exploitation cesse le 01 juillet 1933.

GORZE compte alors 958 habitants (en 1932) et Ars sur Moselle 3868.

En 1939, GORZE est le siège d’un important camp militaire, le camp Morin " implanté " dans les bois, à proximité de la ferme de Labauville.

En 1940, les expulsions viennent amputer GORZE de plus de la moitié de sa population. Durant la guerre, les forêts de GORZE, coupées par la frontière, voient passer de nombreux évadés. GORZE est la première localité de la Moselle à être libérée.

Le 7 septembre 1944, vers 18h30, une compagnie d’infanterie américaine fait son entrée à GORZE après un bref combat.

Que dire de l’après-guerre! A l’allégresse de la libration succède la période de reconstruction. Il faut réparer les dommages provoqués par la guerre.

Les années ont passé. Hormis le château et son église, GORZE n’a rien conservé de sa splendeur passée. Ars est devenu le chef-lieu de canton et depuis deux mois le siège de l’archiprêtré.

Il reste aussi et surtout le site avec sa vallée et sa couronne de forets. Et puis encore un je ne sais quoi qui fait de ce lieu où souffle l’esprit.

Maurice BARRES a écrit de bien belles pages sur Gorze dans " Colette BAUDOCHE ", nous vous convions à les lire ou à les relire. Après quoi, le livre refermé, venez visiter ce Gorze qui a tant de " choses " à vous faire découvrir.

Marcel GOURLOT

Ouvrages ou articles consultés, outre ceux cités :

- " L’abbaye de Gorze " par l’Abbé F. CHAUSSIER (1894)

- " Le rattachement à la France de la Terre de Gorze " par André BELLARD. Extrait de l’annuaire de la Société d’Histoire et d’Archéologie de la Lorraine (1961)

- " Le palais abbatial de Gorze -
Etude historique et archéologique ", par Marie France JACOPS - Extraits de " Patrimoine et Culture en Lorraine " (1980)

- " Le nécrologe de Gorze ", par Michel PARISSE (1971)

- Les suppléments à " La petite
Etoile ", journal scolaire de l’école mixte de Gorze publié sous la direction de M.J. RIETHMULLER.

En 1961, à l’occasion du tricentenaire du rattachement de la Terre degré à la France, on découvre le palais abbatial. Durant quelque jours, l’hospice s’efface pour redevenir la demeure des abbés. Les festivités passées, le château retourne à sa vocation hospitalière et l’on oublie le monument. Le dictionnaire des châteaux de France, dans son volume sur la Lorraine (Berger-Levrault, 1978), ne le mentionne même pas. Il faut attendre 1980 et la construction du centre de soins et d’hébergement, pour que le château sorte de l’anonymat..

Débarrassé des bâtiments du XIXème siècle qui le flanquent, le château retrouve son plan original. La grande cour, séparée en deux parties -hommes et femmes - par un préau, redevient un parterre à la français. Depuis, grâce à la compréhension de la direction du centre et aux efforts d’une poignée de bénévoles, le château est accessible au public. Les visiteurs peuvent accéder librement à la cour d’honneur, aux parterres, aux terrasses et, sur demande, à la chapelle.

Le palais abbatial est un héritage de la célèbre abbaye fondée en 749 par CHRODEGANG, 37ème évêque de Metz. Après 13 siècles d’existences, l’abbaye est détruite en 1552 lors du siège de Metz et les moines prennent le chemin de l’exil. Morte dans ses murs, l’abbaye va également disparaître dans ses règles. En effet, en 1572, à l’instigation du Cardinal de Lorraine, le Pape Grégoire XIII la sécularise. La Terre de Gorze subsiste cependant sous la houlette d’un abbé commendataire auquel on a adjoint un chapitre de chanoines. Durant plus de 100 ans, l’église paroissiale est le seul témoignage laissé par les abbés. Elle abrite le chapitre. En 1668, Louis XIV donne la Terre de Gorze à un prince d’origine bavaroise : Philippe Eberhardt de LOEUWENSTEIN. Ce grand seigneur décide de reconstruire une résidence digne de son rang.

Les travaux, commencés en 1696 sous la direction de Pierre BOURDICT, se terminent en 1699. Philippe Eberhardt de LOEUWENSTEIN résida très pu dans son château. Son successeur immédiat, le prince Armand-Jules de ROHAN GUEMENEE, archevêque de Reims, ne séjourna pas non plus à Gorze. Les abbés suivants, monseigneur Bernardin GIRAUD, archevêque de Damas, puis le Prince Doria PAMPHILI, nonce apostolique à Paris, nommé par Louis XVI en 1783, ne firent que passer à Gorze.

Jusqu’à la Révolution, les appartements du château furent occupés par l’Abbé de CHEVREAU, doyen du chapitre et vicaire général de la Terre de Gorze.

Le château fut ensuite :

- vendu comme bien national à Romain GARY, un particulier de Metz, puis aux sieurs BEAUJON et MANGEOT (1808)

En 1811, à la suite d’une habile campagne menée par Joseph Louis Anne de MARIONNELZ, maire de Gorze, le château et ses dépendances sont cédés au Département en vue d’y installer le dépôt de mendicité de la Moselle. La candidature de Rodemack n’est pas retenue.

- Hôpital militaire (1813)

- Caserne de Cavalerie (1816)

- Propriété et succursale de l’hôpital Saint Nicolas de Metz (1828)

- Dépôt de mendicité (1845) et, changeant de nom, asile départemental (1880) puis maison de refuge

- Hospice départemental (1922)

- Centre de soins et d’hébergement (1978)

Cet important établissement compte actuellement 420 lits.

Depuis 1932, la porte d’entrée, l’escalier les terrasses et les fontaines sont classés monuments historiques.

Le plan du château, construit par Philippe Eberhardt de LOEUWENSTEIN en 1699, et tel qu’on peut le voir aujourd’hui, est n forme de U. Il est composé d’un bâtiment central encadré par deux pavillons, prolongés par deux ailes en retour d’équerre. Le bâtiment central et les ailes sont coiffés de toits à " la Mansart ". Une toiture à quatre pans chapeaute les pavillons. L’ensemble des constructions est couvert d’ardoises.

Coté ville, le corps central, moins élevé que les pavillons, est très ornementé. La porte cochère, encadrée de piliers à chapiteaux d’ordre ionique, est fermée par une grille d’époque en fer forgé. Les écoinçons et l’entablement sont décorés de guirlandes de roses et de marguerites. Au centre, le triangle évoque la Sainte Trinité. Au rez-de-chaussée, les baies sont protégées par des grilles " à tombeau ". Les fenêtres du second niveau sont surmontées de têtes féminines accostées de cornes d’abondance déversant des fleurs et des fruits. Les lucarnes de la toiture sont agrémentées de chute de fleurs. Au coté Nord de la façade, la porte de la chapelle s’ouvre sous un arc en plein cintre. Les façades des ailes et des pavillons, plus austères, sont dépourvues d’ornement. De part et d’autre des ailes, un important chasse-roues fait office d’arc-boutant.

Les façades intérieures donnant sur la cour d’honneur sont richement décorées. Toutes les fenêtres donnant sur cour possèdent des clés à têtes masculines et féminines. Des cassolettes, des cornes d’abondance, des vases surgissent à tous les niveaux. Les fenêtres du corps central sont surmontées : à gauche, Vulcain, au centre, Minerve, à droite, Mercure. L’arc des portes murées des ailes est orné au Nord d’une tête de vieillard et de chutes de houblon, au Sud, d’une tête de femme et grappes de raisin. Tous ces ornements baroques, d’inspiration profane, font oublier que la demeure était destinée à un abbé, commendataire il est vrai. Le rez-de-chaussée du corps central tient lieu de porche et permet d’accéder à la cour d’honneur et à la chapelle.

L’escalier voisin de la chapelle a conservé sa grille d’appui et ses caissons en fer forgé du XVIIème siècle. La chapelle, à vaisseau unique, se termine par un choeur à voûte en cul de four. L décor baroque déroule ses frises et ses trophées tout autour de la nef et du choeur. Une peinture ornant la voûte du choeur représente Saint Gorgon, patron de l’abbaye.

Coté Ouest, la cour d’honneur est bordée par un petit mur abritant au centre un petit bassin et un jet d’eau. Encadrant ce bassin, un rampe d’escalier donne accès aux parterres. La paroi de ces rampes met en scène la l étende de Jason et de Médée : à droite, le mariage sous les yeux du petit dieu
Eros, à gauche, Médée, après le meurtre de ses deux enfants, est emportée dans les airs sur un chars attelé de deux dragons. Deux niches avoisinent ces deux sculptures, l’une abrite Jason (à droite), l’autre, la statue de l’abondance (à gauche). Au bas des escaliers, des sphinges (sphinx féminins) montent la garde.

Les parterres, plantés d’arbres, aboutissent à un mir cintré qui bordait autrefois un grand bassin. Des parterres, un escalier conduit à une seconde terrasse en arc de cercle, creusée d’un canal surmonté de huit niches à arcades habitées de nymphes, de divinités et d’animaux marins. Le thème de l’eau est présent partout. Plusieurs niches abritent des fontaines. Les fonds foisonnent de personnages, d’oiseaux, d’arbres, de plantes et de bâtiments. Un escalier permettait jadis d’accéder au potager et au verger qui s’étendait jusqu à la forêt. Cet élégant ensemble de niches et de statues souffre hélas des injures du temps et de l’indifférence des hommes. On ne peut que déplorer l’état d’abandon dans lequel se trouve cette admirable construction remontant au XVIIème siècle.

Marcel Gourlot

GORZE -
CITE HISTORIQUE

Fondée à l'aube des temps carolingiens, l'abbaye bénédictine de Gorze devait briller d'un vif éclat pendant plus d'un millénaire.

Les abbés de Gorze avaient le droit de haute et basse justice et frappaient monnaie. Ils étaient si puissants que les rois de France les comptaient parmi leurs alliés.

Le déclin de l’abbaye survient en 1552. Les bâtiments conventuels sont incendiés et les moines dispersés par les troupes françaises assiégeant Metz. En 1572, l'abbaye est sécularisée et les moines sont remplacés par un chapitre de chanoines.

Le coup de grâce est donné en I790. La " Terre de Gorze", victime de la ‘Constituante’ a vécu.

De sa splendeur passée, Gorze conserve cependant des témoins qui méritent une visite. Les fleurons en sont sans conteste l'église et le palais abbatial.

A défaut de l'église abbatiale, détruite au XVIème siècle, il nous reste encore l'église paroissiale fondée vers 1077 par l'Abbé Henri Le Bon, 23éme abbé de GORZE. Selon la chronique, il restaure l’abbaye et bâtit sept églises.Placée sous le patronage de Saint Etienne, elle a subi bien des vicissitudes et a été reconstruite et restaurée à plusieurs reprises. Elle servit d’église collégiale de la sécularisation (1572) à la révolution. L'élise Saint
Etienne est orientée.

L'extérieur :

Vue de l'extérieur elle est romane, à l'intérieur elle est résolument gothique.
Eglise de transition quant au style, c'est un des premiers témoins de l'art gothique en Pays Messin.

Son vieux clocher, édifié sur la travée du transept (le doigt de Dieu) est rectangulaire 9m sur 6.Il ne possède plus qu'un étage, éclairé par des fenêtres géminées. Le deuxième étage a disparu au XVIème siècle au cours d'un incendie. Le bulbe surmontant le clocher, peu en rapport avec le style de l'église, a été construit en !824 et a remplacé une toiture à quatre pans.

La façade formant pignon est ornée d'une rosace (restaurée) et d'un portail moderne dont le tympan représente la lapidation de St Etienne.

Les élévations latérales sont ponctuées de contreforts alternant avec d'étroites fenêtres -simples lancettes- de la nef et des bas-côtés.

La façade nord, romane, est percée de deux portails :

La petite porte, réservée autrefois au clergé, est sommée d'un arc en plein cintre.

L'arcade trilobée met en scène un "jugement dernier" à sept personnages : un christ juge, assis, lève ses mains ouvertes, à ses pieds, à droite, un défunt se dresse hors de son tombeau, les yeux ouverts, à gauche , un "maudit", les yeux fermés s'arc-boute dans la gueule d'un dragon.

Au sommet de l'archivolte deux anges sonnent de la trompette. Aux retombées de la voussure deux diablotins grimaçants voisinent avec les chapiteaux à crochets.

Le grand portail, dit aussi "porte royale" est précédé d'un porche moderne (1910) à trois entrées formant péristyle. Le tympan de la porte, en plein cintre, représente une vierge en majesté accolée de deux anges thuriféraires. A ses pieds sont agenouillés, mains jointes, un homme et une femme en costume d’époque, les donateurs.

La voussure se termine par deux petits personnages dont un, malheureusement, est décapité.

Le chevet, animé par les pans de l’abside et des absidioles et par les hautes fenêtres cantonnées de contreforts est particulièrement beau.

L'intérieur :

L’intérieur de l'église frappe par l’harmonie de ses proportions. Les voûtes romanes s'ouvrent et font place au gothique. L’édifice a trois nefs à cinq travées éclairées de hautes fenêtres. Dans la nef centrale, des fenêtres aveugles donnent dans les combles des bas-côtés. Les piliers sont monocylindriques, à chapiteaux sculptés de crochets. Dans la nef, seules deux têtes forment culots.

Le transept s'ouvre sur les trois absides à pans coupés. Le choeur est éclairé par six hautes fenêtres. La voûte du choeur est surmontée d'une tête d'abbé mitré et celle du transept nord présente une clé à cinq têtes. Le décor et l'ameublement anciens ont disparu. Nous devons aux chanoines la majestueuse boiserie en chêne sculpté du choeur (1744). Ces boiseries, de style rocaille, encadrent six toiles représentant des scènes de l'Ancien et du Nouveau Testament. Ce sont de gauche à droite :

- Le sacrifice d'Isaac,

- Jésus et la Samaritaine au puits de Jacob,

- La parabole de l’Enfant Prodigue

- Le sacrifice de Caïn et d'Abel,

- Agar et
Ismael dans le désert,

- Les disciples d’Emmaus.

Les panneaux inférieurs qui portaient des emblèmes religieux ont été mutilés par les révolutionnaires en 1793. Les deux crédences sont du XVIIIème siècle.

Dans le bas-côté nord, au-dessus de la porte royale, est suspendu un Christ en bois polychrome attribué à l'école de Ligier Richier. Le millésime 1764, au bas de la croix, indique une restauration.

L'orgue actuel (1910) est l'oeuvre du facteur HAERPFER. Il a remplacé un orgue Dalstein Haerpfer construit en 1882. Avant cet instrument Gorze possédait un orgue construit en 1772 par le célèbre facteur lorrain Joseph DUPONT. Cet orgue au buffet richement sculpté a été acquis par la fabrique d' Hinckange prés de Boulay. Il faut aller l'admirer dans l'église d'Hinckange.

Le maître-autel et les autels des absidioles datent de 1860, la chaire à prêcher est de 1885.

La belle grille en fer forgé entourant le baptistère est l’uvre d'un artisan local.

- " L’abbaye de Gorze " par l’Abbé F. CHAUSSIER (1894)

- " Le palais abbatial de Gorze -
Etude historique et archéologique ", par Marie France JACOPS - Extraits de " Patrimoine et Culture en Lorraine " (1980)


Merci à Marcel GOURLOT

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